
Pour commencer, comment appelle-t-on la langue ? En Amérique latine, on l’appelle couramment castellano (castillan, d’après la région de Castille) par opposition à l’español (espagnol). Cela est également vrai dans certaines régions d’Espagne, où les langues régionales telles que le galicien et le catalan sont des langues officielles qui pourraient également être qualifiées d’espagnol.
Pourquoi existe-t-il des différences ?
Lorsque les colons espagnols ont parcouru le monde pour répandre la parole de Dieu en échange de métaux précieux, ils ont apporté avec eux une langue qui était en train d’évoluer dans leur pays natal.
Un linguiste, Marckwardt, a appelé ce processus « le décalage colonial » pour décrire une situation où la langue parlée dans les colonies est détachée des évolutions de la langue de son pays d’origine. Un exemple, en anglais, serait l’utilisation du mot automne fall employé aux États-Unis et autumn en Grande-Bretagne ; quand les colons britanniques se sont installés en Amérique, le mot automne fall était plus couramment employé que la version latine en anglais britannique. Le mot fall, plus ancien et d’origine germanique, est devenu obsolète en Grande-Bretagne (le mot français fut emprunté), mais est resté en usage aux États-Unis. Ce processus concerne aussi bien le vocabulaire que la grammaire.
Par la suite, des groupes d’immigrants provenant de différentes parties de l’Europe ont exporté les traditions linguistiques avec eux en Amérique latine. En retour, ces groupes ont rencontré localement différentes traditions linguistiques, créant ainsi des variations dans les dialectes locaux.
Voseo
Lorsque les colonies espagnoles ont été fondées par différents groupes, ils ont amené avec eux l’espagnol parlé en Espagne à cette époque, ainsi que des éléments de leurs dialectes locaux. L’espagnol parlé dans les colonies a alors commencé à évoluer de manière légèrement différente, en raison du peu de communication avec l’Espagne (le téléphone était encore loin d’être inventé). Quelques éléments d’ancien espagnol ont été conservés, d’autres abandonnés.
L’un des exemples les plus marquants de ce processus est l’utilisation du mot vos, principalement employé en Argentine, au Paraguay et en Uruguay. À l’origine un pronom personnel pluriel de la 2e personne, vos est à présent utilisé comme pronom personnel singulier de la forme polie de la 2e personne (à la manière du vous français), et peut être employé entre amis. Il était couramment utilisé en espagnol quand la langue a atteint l’extrême sud de l’Amérique. Il est tombé en désuétude en Espagne, mais est resté en usage en espagnol rioplatense. Aujourd’hui, comme il y a 150 ans, dans un café animé de Buenos Aires, il est plus probable qu’on vous demande « ¿de donde sos? » que « ¿de donde eres? »
L’utilisation de vos et sa conjugaison distincte semblent maintenant de plus en plus populaires dans certaines parties d’Amérique latine, où il avait déjà été utilisé par des groupes minoritaires, tels que la Bolivie, le Chili, le Nicaragua et le Costa Rica.
Mais le plus important, c’est que vous serez compris partout dans le monde, que vous utilisiez tú comme vos. Les Espagnols pourraient simplement penser que vous voyagez dans le temps et vous arrivez du moyen âge (ou d’Argentine).
Ustedes
Les variantes latino-américaines de l’espagnol n’utilisent pas le mot vosotros (vous, pluriel, forme informelle), lui préférant le mot formel ustedes. Cela signifie que les étudiants en Espagne doivent se rappeler une autre terminaison verbale.
Par exemple, en Espagne, vous pouvez dire ¿Cual fue la última pelicula que visteis? (quel était le dernier film que vous avez vu ?) à vos amis, mais vous diriez probablement ¿Cual fue la última pelicula que Vieron? à vos grands-parents. En Amérique latine, la dernière forme est utilisée dans les deux cas.
Ustedes est également utilisé dans les îles Canaries, mais seules les Baléares et l’Espagne continentale emploient vosotros. Si vous utilisez uniquement la forme latino-américaine, vous serez très bien compris en Espagne. En fait, les gens vous considéreront probablement comme une personne très polie !
Vocabulaire
La grande majorité des mots espagnols sont universels, mais certains ne le sont pas, par exemple teléfono móvil / celular et ordenador / computadora – le deuxième mot de chaque paire étant la forme latino-américaine. Il y a aussi beaucoup plus de mots qui se différencient parmi les différentes formes de dialecte. Par exemple, « stylo » se dit boligrafo en Espagne, mais lápiz pasta au Chili, lapicera en Argentine et ainsi de suite.
Dans l’ensemble, les différences de vocabulaire ne sont pas plus importantes que celles entre l’anglais britannique et l’américain.
Une remarque importante cependant. En Espagne, le verbe coger (attraper) est très employé, non seulement pour désigner le sens d’attraper, mais aussi celui de saisir ou de chercher. Par exemple, coge las riendas de tu vida, prendre son destin en mains. En Amérique latine, coger est un mot d’argot largement utilisé pour décrire l’acte d’amour.
Prononciation
Les plus grandes différences en espagnol résident dans la prononciation, mais même ici elle n’est pas si importante. Par exemple, dans de nombreuses régions d’Amérique centrale, le s n’est pas toujours prononcé et certaines syllabes peuvent être silencieuses. En Argentine, le double l, généralement prononcé comme le y de yeux, se prononce comme le j de jeux.
La différence plus notable entre la prononciation d’Espagne et d’Amérique latine est peut-être le « zézaiement » (même si ce n’est pas techniquement parlant un zézaiement) commun à Madrid et dans d’autres régions d’Espagne. La légende veut que cette prononciation vienne du roi Ferdinand, dont le zézaiement aurait été copié par la noblesse espagnole. Comme c’est souvent le cas, la légende est probablement fausse, la prononciation est plus susceptible de provenir de sons qui existaient en castille médiévale, mais cela n’explique pas pourquoi il n’a pas été exporté vers les colonies.
Vous serez inévitablement imprégné de l’accent local, quel que soit l’endroit que vous choisirez pour apprendre l’espagnol, mais cela ne vous empêchera pas de communiquer avec l’ensemble des hispanophones. Nous avons tous un accent quand nous parlons, et il n’y a pas de « bon » ou de « mauvais » accent. Si vous prenez un accent distinctif quand vous apprenez une langue, que ce soit en espagnol ou dans une autre langue, il fait partie de vous et de vos expériences personnelles. Cela peut également s’avérer être un bon sujet de conversation lorsque vous voyagez.
Devriez-vous apprendre l’espagnol en Espagne ou en Amérique latine ?
Certaines personnes disent que l’espagnol colombien est la variante de la langue la plus claire et la plus belle. Certains disent que l’espagnol argentin est l’espagnol le plus sexy. D’autres croient que l’espagnol de Madrid est le plus important, car c’est là que se trouve l’Académie royale espagnole qui normalise la langue.
Mais il ne s’agit pas de comparer l’espagnol parlé en Espagne et celui parlé en Amérique latine. Au moment de choisir l’endroit où vous voudriez apprendre l’espagnol, demandez-vous plutôt où vous souhaiteriez être, quel genre d’aventure vous aimeriez vivre et, naturellement, de quel budget vous disposez. Mais rassurez-vous, quelle que soit la variante de l’espagnol que vous apprenez, vous serez compris dans l’ensemble du monde hispanophone.

C’est la troisième langue parlée dans le monde
L’espagnol est la langue maternelle de 480 millions de personnes, C’est l’une des principales langues de communication, utilisée sur quatre continents.
L’espagnol ou le castillan compte 577 millions de locuteurs.
En général, le castillan s’éloigne moins de la langue latine que l’italien : la plupart de ses mots ne présentent qu’une modification légère du latin, selon des lois très faciles à saisir. Par exemple, dans les radicaux, e se change en ie (tiempo; temps; de tempus); o en ue (bueno, de bonus; c en g seguro, de securus ); f en h (hacer, de facere; p en b sobre, de supero); t en d (vida, de vita); cl, pl et fl en Il (llamar, do clamare; lleno, de plenus; llama, de flamina); li en j et en g (hijo, de filius; mujer, de mulier). Tandis que l’italien a rejeté à peu près complètement les consonnes finales du latin, et que le français, tout en les conservant dans l’orthographe, les a fait disparaître dans la prononciation, l’espagnol les a mieux gardées, dans la conjugaison surtout : ainsi, des mots fuimus, fuistis, fuerunt, il a fait fuimos, fuisteis, fueron. Mais, tout en laissant subsister en grande partie la conjugaison latine, l’influence germanique a amené la suppression de la voix passive, et, dans la déclinaison, l’emploi des prépositions à la place des flexions casuelles.
La construction de l’espagnol est directe; il n’y a inversion que dans certains cas, comme en français. Quant à la prononciation, on remarque dans l’espagnol une aspiration gutturale fréquente, transcrite par le j (jota), comme dans hijo (fils), et par le g, comme dans girasol (tournesol). Cette aspiration est regardée par les uns comme une importation arabe, par les autres comme un vestige du ch allemand; beaucoup de raisons font penser qu’elle est indigène, et antérieure à toute conquête de la péninsule ibérique par des étrangers. On doit encore observer que le z a le son du th anglais; que la double l (ll) a le son de notre I mouillée; que la lettre n accentuée (ñ) répond à notre nasale gn dans bagne, digne, etc.
La langue castillane est remarquable par sa richesse, sa gravité, son énergie qui n’exclut pas la grâce. C’est un très bel idiome, longtemps en faveur en France dans les hautes classes de la société. Depuis Henri II jusqu’à la mort de Marie-Thérèse d’Autriche, femme de Louis XIV, il fut de mode en France de connaître la langue et la littérature de l’Espagne. On sait le parti qu’en a tiré Corneille. Il existe 7 ou 8 grammaires castillanes qui datent de cette époque. La plupart des ouvrages espagnols se traduisaient alors presque aussitôt en français. Parlé jadis à Naples et à Milan, le castillan l’est encore dans la moitié de l’Amérique.
L’espagnol dans le monde

Les dix-sept communautés autonomes de l’Espagne.
L’Espagne d’outre-mer : les îles Baléares, les îles Canaries, Melilla et Ceuta.

On nous demande souvent d’expliquer les différences entre l’espagnol parlé en Espagne et celui parlé en Amérique latine. Même s’il y a une distinction entre les différentes variantes de l’espagnol, la première chose à préciser est que tous les hispanophones se comprennent, que ce soit à Cadix ou Cusco, Salamanque ou Saint-Domingue.
Ceci dit, il y a bien des différences entre l’espagnol parlé en Espagne et celui parlé en Amérique latine. Mais il y a également des différences entre les variantes de l’espagnol parlé dans différentes régions d’Amérique Latine, comme il y en dans différentes régions d’Espagne.
